très vieux chat, fin de vie

Bonjour,

J'ai un très vieux chat de 18 ans. Il est dans un mauvais état depuis un an maintenant : infection pulmonaire en juillet 2007, il a commencé à se réfugier dans les placards, etc. Avec antibiotiques en injection tous les soirs, il s'en est sorti, mais depuis, il est dans la dernière ligne.
Depuis, notamment : respiration bizarre, bruyante, et borborygmes continuels, nuit et jour, venant de l'estomac (le vétérinaire pense qu'il a peut-être une hernie hiatale entre l'estomac ou l'oesophage et les voies respiratoires).
En octobre urée au dessus de la normale, puis c'est passé.
En novembre décembre : amaigrissement, affaiblissement au point qu'il ne faisait plus sa toilette, mais je n'ai pas vu tout de suite ... tant et si bien que quand je l'ai amené chez le véto, il faisait 2kg au lieu de 3kg600 poids précédent.
Il m'a dit que c'était probablement une "fonte terminale", et que mon chat n'en avait plus que pour quelques semaines. Il lui a fait 2 piqures d'anabolisants à 15 jours d'intervalle.
Je passe les vacances de noël à pleurer chez moi à l'idée d'avoir à l'emmener chez le vétérinaire pour le faire tuer, et non le faire soigner (le vétérinaire m'ayant précisé que la "fonte" était progressif, et qu'en général les propriétaires lui amenaient l'animal pour le faire piquer, quand ils en avaient "marre d'être face à un squelette").
Mon chat a-t-il senti quelque chose de ces pensées ? Alors qu'il est d'habitude tout calme chez le vétérinaire, la fois suivante, du début à la fin, il a montré qu'il n'avait pas, mais pas du tout, envie d'y mettre les pieds.
Contre tout pronostic, mon chat est assez vite remonté à 3kg600...en revanche, depuis, ses poils ne repoussent quasiment plus.
Je le sais parce que comme ça faisait des sortes de mini "dread locks" inextricables, j'ai coupé ces catons pleins de saleté, et encore aujourd'hui, mon chat a les flancs dégarnis (il ne reste que l'épaisseur de duvet non coupé) car 6 mois après rien n'a encore repoussé ...

Puis je ne sais même plus quand, en février (?) mon chat ne déféquait plus. Emmené chez le véto, il s'avère qu'il y a une selle dure comme pierre qui coince tout. Le véto lui enlève sans anesthésie en m'expliquant que vu son état, une anesthésie est un risque vital pour le chat. Le chat miaule de douleur quand il lui enlève...
Quelques temps après, un matin, j'entends mon chat miauler, comme de douleur, dans un placard (ouvert) de ma chambre. A plusieurs reprises. Me levant, je vais voir : dans le placard, il vient de laisser une crotte, dure comme la pierre. Je me dis "ce n'est pas possible ? Il a fait ça tout seul ?". Je me suis dit : il a préféré se débrouiller seul plutôt que l'idée qu'on lui refasse pareil ?
Je dois prendre mon chat pour un être un peu trop intelligent et doué de volonté … ce n'est qu'un animal, et je me fais des films.
En attendant, je mélange depuis, régulièrement, du produit pour éviter cela, à sa nourriture (produit qui graisse la paroi intestinale).

Dernier épisode notable : là maintenant, avec la chaleur.
Soupesant mon chat lundi soir, je le trouve de nouveau bien léger. Puis la peau du cou ne revient pas en place vite. Je l'emmène chez le véto le lendemain soir : il le met sous perfusion pour le réhydrater. Le chat miaule, le vétérinaire me confirme que ce n'est pas forcément bien agréable pour lui. Il s'en va en me demandant de tenir la perfusion (et mon chat) le temps qu'elle s'écoule.
Sauf que moi j'en peux plus de tenir mon chat qui miaule parce qu'il souffre, et ça fait un an que ça dure, donc au bout d'un moment, je pleure. Ce qui ne rassure pas le chat … c'est comme un cercle vicieux.
Finalement, une assistante m'entendant pleurer vient tenir la perfusion à ma place et s'occuper de mon chat pour le rassurer.
Quand le vétérinaire revient, il apprend que je pleurais. Il commente à son assistante, avant de faire une injection d'anabolisants (mon chat mangeant très peu depuis ces quelques jours) : "mademoiselle fait preuve d'une détermination peu commune vis à vis de son chat. Habituellement, les propriétaires finissent par "laisser faire" le processus, quand ils en ont marre, et attendent que ce soit tard, pour nous amener l'animal qui ne peut plus alors qu'être euthanasié".
Je lui ai répondu "mais je ne peux pas laisser faire !". Il m'a répondu : "je sais".
M'a confirmé qu'il y avait très peu de chance que mon chat meure de mort naturelle d'un coup par surprise (je lui disais que je préférerais encore ça). Que donc l'issue très probable est que je doive l'amener pour le faire piquer.
Sauf que c'est une décision que je suis toute seule à devoir prendre ou non, et qu'elle est beaucoup trop lourde pour moi. Pour moi, Faire piquer mon chat, ça reste trahir la confiance qu'il m'a fait pendant 18 ans. C'est l'emmener chez le vétérinaire pour le faire tuer.
Nous on dit qu'il vaut mieux les tuer quand ils souffrent, que c'est un acte d'amour. Mais je ne sais pas. Qu'est-ce qu'ils en diraient eux, qu'est-ce qu'il en dirait lui ?
Et puis ça fait des années qu'il souffre, et des années que des gens me disent "tu devrais le faire piquer, s'il souffre". Alors que je leur expliquais que mon chat vomissait souvent car il a des elico bacter pilori dans l'estomac depuis tout petit.
Est-ce qu'il fallait tuer mon chat parce qu'il vomissait au moins 2 fois par semaine toute sa vie ?

Est-ce qu'il faut tuer un chat qui s'amaigrit dramatiquement ?
Quel seuil de souffrance est inacceptable ?
Pourquoi je suis seule à devoir deviner cela, le savoir, assumer une telle décision ?
Trop lourde.

A son retour chez moi, après cette réhydratation, j'ai cuisiné des foies de volaille : depuis quelques temps, j'ai remarqué que même quand il ne mange pas sa nourriture, il vient me réclamer de partager la mienne quand je mange, et plus qu'avant. Donc j'ai commencé à manger les foies. Il est venu : "miaou". Je lui en ai donné, et redonné, et redonné. Il mangeait tout. Vite, trop vite. Il en a revomi une partie le soir même, ensuite il était prostré sur le canapé.
J'ai aussi trouvé trois grosses crottes dures comme la pierre, suite à cette réhydratation, dans le placard (il fait dans sa caisse, sauf quand c'est des crottes sèches, apparemment). Je n'étais pas là quand il les a faites. Je suis fatiguée de voir des choses comme ça.
Le lendemain, pendant mon absence, il a vomit le reste du foie de volaille. Le soir quand je suis rentrée, il allait mieux, était plus alerte.

A mes questions sur les nouveaux catons qui se faisaient dans ses poils (à des endroits qu'il ne doit plus être assez souple pour atteindre), le vétérinaire a fini par me répondre que quand c'étaient des catons, il n'y avait pas d'autre moyen que la tonte pour les supprimer. Et que sinon, il fallait brosser le chat très souvent, mais que "ça a un côté pénible à faire". Moi j'aurais bien voulu savoir ça plus tôt : ça m'aurait évité d'avoir un chat qui a une tronche encore plus démoralisante pour moi car il lui manque des poils. J'ai effectivement réussi à enlever tous les nouveaux catons avec la brosse … j'étais contente, et le chat aussi.

Pendant ce temps là, mon vétérinaire m'a juste expliqué, en décembre, que la mort par piqure c'était "gentil", à comparer avec une mort "naturelle" qui peut être très violente à voir pour le propriétaire.
Oui peut-être, mais une mort naturelle, ça ne me laisserait pas l'impression de trahir la confiance que m'a fait mon chat pendant 18 ans, en l'emmenant se faire tuer.
Ca m'éviterait d'avoir à vivre ceci :
"Mon frere quand il a fait partir son chien qui avait 20 ans.! avait trop attendu, il n'arrivait pas à se décider, quand il l'a fait il a chialé comme un gosse à cause du regard que "fonc" lui a donné. il m'a assuré que plus jamais il ne ferait une chose pareille. tout ça pour dire que chaque histoire est personnelle."
Je ne sais rien de comment ça se passe une mort comme ça. Je n'ai jamais vu de cadavre avant. J'ai l'impression que je vais devenir folle si je dois emmener mon chat chez le vétérinaire pour le faire tuer …
Et, par ailleurs, s'il meurt à la maison, de mort naturelle, je panique aussi à l'idée que ce soit un soir ou un week end, parce que je ne sais pas comment me comporter avec un cadavre : il ne faut pas y toucher ? Il est possible d'y toucher sans risquer de choper plein de microbes ? Ca met combien d'heures avant de puer ? Qui appeler pour s'en occuper si c'est aux heures de fermeture ?
Et puis, aucune discussion sur "l'après" (enterrement ? Equarrisage ?) avec le vétérinaire pour l'instant.
Et impossible de parler de cela avec mon entourage, ceux et celles qui ont eu des animaux me renvoyant au "geste d'amour et responsable" qu'il faut faire et qu'ils ont fait (surtout sans rien vouloir m'en dire de plus concrètement).
Du coup j'ai l'impression que c'est comme s'il fallait faire cela pour être bien vu, pour ne pas passer pour une odieuse personne, et que une fois qu'on l'a fait, on le justifie, mais on ne veut pas en parler, et pourquoi si ce n'est que ça reste en réalité un moment contestable, une décision contestable pour soi ?

Et, pendant ce temps là, mon chat souffre en faisant lui même des crottes dures comme la pierre. Il serait peut-être mieux d'arrêter cela. Mais je ne peux pas.

A quel stade de souffrance il faut commencer à y penser réellement ?

Bonjour Sophia,

je laisserai Manu notre vétérinaire répondre à tes questions concernant la constipation du vieux chat et sur la douleur supportable pour un chat.

Je me permets en revanche d'intervenir sur tes questions concernant l'euthanasie, ceci est plus de notre ressort et allègera le travail de Manu.

Euthanasie ne veut pas dire tuer ni assassiner. Quand un animal est en fin de vie, que les heures sont comptées, on peut avoir à prendre la décision non pas de le tuer mais de mettre fin à ses souffrances qui le conduisent irrémédiablement à la mort.

Quand on prend cette décision, malgré le bouleversement que çà produit en nous, il faut avoir le courage de rester calme et de continuer à protéger son animal. C'est un moment difficile pour nous car nous devons nous oublier et ne penser qu'à notre chat ou notre chien. Tout doit être fait pour qu'il soit le mieux possible, pas stressé.

L'euthanasie est en effet une mort plus douce qu'une mort naturelle. L'animal ne souffre pas. Il s'endort. D'ailleurs çà se passe comme pour une anesthésie. Le vétérinaire lui fait une piqûre pour l'anesthésier. Là il ne souffre plus. Il dort. Et ensuite une seconde piqûre pour qu'il ne se réveille pas. Un "cadavre" comme tu le dis, c'est un animal qui dort. Ca ne fait pas peur.

Le fait de choisir le moment permet à l'animal de ne pas souffrir car dans une mort naturelle, il peut souffrir terriblement, convulser etc.... C'est justement ce qu'il faut lui éviter. Donc quand avec l'aide de son vétérinaire, on voit qu'il n'y a plus aucune chance d'amélioration, plus aucune chance pour le chat de ne plus souffrir, quand on voit que les heures ou les jours sont comptés et que la mort risque d'être terriblement douloureuse (ce qui est hélàs très souvent le cas), on prend la décision d'endormir son animal.

La trahison, après de nombreuses années d'amour, serait de laisser faire la nature, de se voiler la face et de laisser l'animal mourir dans la souffrance. La trahison serait d'abandonner son animal à son triste sort.

Et il faut beaucoup d'amour, pour offrir à son animal une fin digne de l'amour que nous lui avons porté toute sa vie.

Si la mort devait intervenir de façon naturelle un soir, une nuit ou un week end, il faut soit enterrer ton chat dans le jardin, soit le faire incinérer. Dans ce cas, il faudra le porter chez le vétérinaire. En attendant, il faudra le mettre dans un endroit frais. Je peux t'assurer qu'une morte naturelle douloureuse puis devoir garder son chat mort une nuit ou un week end à la maison est quelque chose de très très très traumatisant. Beaucoup plus que de le voir s'endormir dans de bonnes conditions et entourer de tout ton amour.

Manu repondra à tes questions plus médicales

Je suis tout à fait d'accord avec Joëlle.
Pour tout le monde, c'est très très dur de prendre cette décision. Ce sentiment de trahison, il est normal.
Mais ce n'est pas une trahison, c'est ton devoir d'homme. Tu es obligée vis-à-vis de lui, au nom de cette amitié qui vous lie depuis 18 ans, de lui rendre ce dernier service.
Tu ne peux pas le laisser terminer sa vie dans cet état. Finir par mourrir seul, de "faiblesse" finalement, ce n'est pas très marrant. Tu vas le voir se dégrader et se dégrader encore; tu vas le voir respirer très mal, parce qu'il fait chaud, et qu'il ne trouvera plus l'air dont il a besoin.
Tu auras un souvenir pénible de ses derniers instants, et tu regretteras... Crois-moi!
Il faut absolument que tu parles avec ton vétérinaire. Dis-lui ce que tu as sur le coeur, tes peurs, tes doutes. Demande-lui comment ça se passera. Si tu peux ou dois être là. Pose toutes les questions qui te viennent, c'est très important. Tu dois être en confiance...
On fait toujours une piqûre avant, pour l'endormir comme s'il devait subir une chirurgie. C'est une mort parfaite pour un animal.
Contrairement à ce que tu crois, il ne se rendra pas compte de ce qui se passe. Les animaux n'ont pas vraiment conscience de la mort... Fais ce que tu peux pour être calme, auprès de lui.
Courage à toi, parceque c'est vraiment pour toi que ce sera le plus difficile, mais pas pour lui.